Pour raconter la Première Guerre, le collectif Hotel Modern fait le choix de transformer le théâtre en un plateau de tournage. Mais en un génial pied-de-nez à la surenchère spectaculaire du moment, tout le décor, accessoires et personnages compris, tient dans une boîte à chaussures ! Le plateau est littéralement pris en main par une équipe de trois jeunes femmes qui, accompagnées par un musicien chargé des bruitages, courent d’une table à l’autre pour donner vie à des soldats de quelques centimètres de haut. Nous vivons le quotidien de la guerre grâce aux caméras qui retransmettent l’image sur un écran face à nous.
C’est un spectacle réellement démesuré, sauf que le miniature prend ici le pas sur l’emphase. Tout est question de proportion et la violence des combats n’est pas atténuée, bien au contraire.
Il y a dans La Grande Guerre un acharnement à nous faire revivre cette période par le prisme de ceux qui se sont battus. Au pupitre sont lues des lettres du front et des extraits de journaux intimes. Il s’agit bien de remettre la main sur cette histoire pour se la réapproprier autrement dit, de replacer au cœur de la guerre le subjectif d’un point de vue. Assistant au tournage en direct, nous nous retrouvons, nous spectateurs, à l’avant-poste du récit de la « Grande Guerre ». L’association de l’aspect rudimentaire des outils (objets du quotidien détournés et marionnettes bricolées) et la précision du langage cinématographique (montage alterné, travellings, zooms) concourt à cet effet de réel. Car ici il n’y a rien de sophistiqué. Grâce à trois petites caméras familiales, une poignée de soldats en plastique et des bottes de persil, c’est l’enfer des tranchées qui se joue. Et c’est proprement jubilatoire.
Primé dans le monde entier La Grande Guerre est incontestablement un spectacle unique. Certainement parce que nous ne nous étions jusque-là jamais aventurés aussi près de cet « opéra sordide et puant » tel que décrit par Jean Echenoz dans son terrifiant roman 14.
- Créateurs
- Herman Helle, Pauline Kalker, Arlène Hoornweg | Hotel Modern
- Conception son et performance live
- Arthur Sauer
- Acteurs
- Maartje van den Brink, en alternance avec Anouk Driessen, Laura Mentink, Menno Vroon
- Technicien
- Joris van Oosterhout
En bref...
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